
INTERVIEW abdelaziz BENAISSA
Abdelaziz Benaissa: Vivra, vivra bien, vivra mieux uniquement celui qui fera de la technologie sa religion!
A l’air du tout numérique et la digitalisation massive le continent africain peine à se positionner sur la carte du nouveau monde. Top management en faillite et manque de vision stratégique un autre point en commun entre les diverses gouvernances africaines, tel était le constat du spécialiste des nouvelles technologies de l’information et la communication tunisien Mr: abdelaziz Benaissa, chercheur et consultant international en la matière, il a accepté de nous éclairer sur les défis du continent africain face à ce qui façonne le nouveau monde.
1/Bonjour monsieur Benaissa. Pouvez-vous nous parlez un peu de votre expérience dans la recherche et la réalisation de projets?
- Etant parmi les premiers africains diplômés en Informatique dans les années 70 dans les universités françaises, ceci a coïncidé avec une demande importante de l’utilisation des ordinateurs et du traitement informatisé des taches fastidieuses de gestion. Donc on a été sollicités immédiatement à prendre en charge la conduite de projets d’informatisation de ce qu’on appelle actuellement les applications classiques de gestion mais au début uniquement sur les «Gros Ordinateurs» et pour le compte des grandes entreprises étatiques. Pour évoluer un peu plus tard dans les années 85-95 vers les moyennes entreprises avec l’arrivée sur le marché des «Mini-Ordinateurs» on a dû conduire des projets chez des sociétés moyennes pour permettre ainsi a ce segment du «Midle Market» à utiliser ce magnifique outils de gestion devenu heureusement un peu moins cher et donc à la portée de plus en plus d’entreprise même du privé.
Et c’est seulement fin 88-89 que les «Micro-Ordinateurs» font leur apparition et l’Informatique est devenu un outil pour tous et pour tout taille d’entreprise, voir même à l’utilisation personnelle et domestique.
Vers le début de ce 21em Siècles, un Cocktail de «L’Informatique, les Télécoms et l’Internet» on est passé carrément à l’ ère du Numérique et on parle ainsi des N.T.I.C.
2/vous étiez à l’origine du premier Salon africain sur l’informatique en 1985. Parlez-nous un peu de cette expérience-là?
- Exact, c’était en Tunisie, en 1985, j’ai organisé avec des amis le premier Salon de l’Informatique ouvert au public. L’Objectif visé à l’époque était de sensibiliser les gens à cette nouvelle discipline, notamment les bacheliers et leurs parents pour les encourager à suivre des études supérieures dans cette spécialité originale et d’avenir. Et on a eu un succès fous ! le vrai gain engendré par ce salon, qui était inauguré par le premier ministre de l’époque, un gain inattendu grâce aux tables rondes qu’on a animé en la présence de responsables du gouvernement et des autorités, on a obtenu l’engagement de l’état de ne pas taxé le matériel informatique qu’au minimum. Effectivement la Tunisie était le premier pays qui a taxé les ordinateurs à seulement 10%, et l’état depuis cette date, a ouvert des écoles supérieurs d’Informatique ce qui a permis a ce petit pays un développement important dans le secteur des Services.
3/ trente-cinq ans après qu’est-ce qui a réellement changé sur ce continent? Et si cet événement devait être relancé, quels seront les points à soulever en urgence?
Malheureusement 35 ans après et l’utilisation de l’Informatique n’a pas réussi à être généralisée suffisamment, sauf dans le secteur privé (banques & assurances).
Le continent du Nord au sud est sous l’emprise d’une bureaucratie lourde, et une administration archaïque, handicapant ainsi tout développement malgré l’existence de compétences et un grand nombre de spécialistes, qui font actuellement le bonheur des pays développés, ainsi la majorité des Informaticiens au canada, les États-Unis et l’Europe sont des africains qui n’ont pas trouvés leur bonheur dans leur pays respectifs. Quand je dis bonheur ça veut dire ils n’ont pas trouvés les moyens et l’environnement propice chez eux, pour exercer ce beau métier.
Je dis dommage par ce que le moyen le plus efficace pour combattre la corruption et la fraude est l’informatisation correcte et complète de l’Administration d’un pays, oui quand le système d’Information, de tel ou tel organisme est basé sur une application fiable, bien conçue par des spécialistes, ne permet à personnes de tricher, grâce aux différents contrôles automatiques et à la traçabilité de toutes les transactions.
4/ finalement, quelles sont les réels problèmes auxquels le continent africain fait face aujourd’hui? Quels sont les pays des plus touchés et pourquoi?
- Aujourd’hui et par rapport aux autres continents, l’Afrique est vraiment en retard, d’abord, par ce qu’on vient de citer: la perte de ces compétences, et on ne sait pas comment les retenir et on ne fait rien pour les attirer de nouveaux à revenir. Également parce qu’il y a un retard dans l’infrastructure numérique (Satellites, débit internet, fibres optique, etc …) et donc on devient de plus en plus dépendant des autres qui ne veulent pas tout nous fournir et surtout pas la dernière génération et les toutes dernières innovations, sans parler des coûts excessivement chers.
Sans oublier l’absence de volonté au top management de nos gouvernement pour placer les N.T.I.C dans la priorité absolue de leur stratégie malgré l’existence ici et là de ministère dédiés à l’économie numérique et aux Start-up sans réellement les dotés de budgets conséquents.
5/ l’Afrique un continent, des états, des cultures, des politiques et des peuples avec des aspirations. Une stratégie panafricaine sur les nouvelles technologies et les réseaux serait-elle possible? Que peut-elle réellement ramener de concret?
Oh c’est un beau rêve! Mais effectivement la meilleure solution pour réduire ce retard. Un effort commun, une vision africaine pour une stratégie unique pour toute l’Afrique, comme vous dites plusieurs états, des cultures et des peuples, mais c’est ça notre force, c’est un grand et unique marché, c’est un Avenir commun, c’est une aspiration partagée d’un monde moderne. Oui c’est possible c’est urgent et c’est incontournable d’agir ensemble dans cette direction.
6/pourquoi les industries des NTIC peinent à se développer en Afrique ?
Celui qui n’avance pas recule, c’est ce qui nous arrive ! Cette perte du temps de ces vingt dernières d’année on va la payer très chère,
Nous ne sommes pas assez conscients de la récente révolution dans ce domaine qui vient de démarrer celle de la «Digitalisation» et de «L’Intelligence artificielle». Pour la simple raison: ceux qui nous gouvernent n’ont pas assez de visibilité sur l’avenir et le manque de moyens financiers qui vont défaut à la majorité des pays, au risque de rester spectateur de cette mutation et de nous figer au 20 ème siècle alors que les autres sont déjà de plein pied au 21 ème ce qui leur garanti une avance considérable.
Il n’y a pas d’Avenir pour un pays qui ne se lance pas rapidement dans le DIGITAL, il n’y a pas de survie pour un pays qui ne généralise pas l’utilisation des N.T.I.C dans tous les domaines sans exception. Il n’y a pas d’indépendance pour un pays qui ne base pas son économie sur le numérique.
7/ quel avenir pour les nouvelles technologies de l’information et la communication dans le continent? Peut-il s’imposer un jour sur la scène de la production lié aux NTIC?
Nous n’avons pas le choix que de nous réveiller, de nous secouer. La Technologie s’impose à nous, s’introduit partout dans notre quotidien, remet en cause tout ce qui nous concerne de près ou de loin, La Technologie se mêle de tout et se mélange à toutes les sauces, elle n’est plus uniquement un secteur à part mais fait partie intégrante de tous les domaines, elle est dans l’éducation, la culture, dans la production, dans les énergies, la Santé, l’agriculture. Elle bouleverse le champ médiatique déjà, le cinéma, voir le sport même, les transports … bref tout est devenu «DIGITAL» tout est à la merci de la Technologie, nos pays aussi, donc nous-mêmes.
Vivra, vivra bien, vivra mieux uniquement celui qui fera de la technologie sa religion!
Abdelaziz BEN AISSA, Consultant Expert en Système d’Information et Formateur en N.T.I.C